Après un temps
d'errance, le futur comte de Boigne rencontre son ami Levassoult. On rapporte à Benoît de Boigne que Sindhia, le chef mahratte, le regrette beaucoup. Bien que celui-ci se méfie des projets
d'exploration de Benoît et malgré leur différend consécutif à la confiscation des bagages du Savoyard, Sindhia a été impressionné par les capacités des deux bataillons formés par Benoît sur le
modèle européen qui contrastent avec ses propres troupes mal organisées. Benoît de Boigne finit par accepter de rentrer au service des Mahrattes. Il est chargé d'organiser une fonderie de canons
à Agra ainsi que d'équiper et armer mille sept cent hommes en deux bataillons.
Benoît de Boigne vit dès lors une vie de grand officier et devient très vite un homme influent. L'un des premiers faits d'armes sous son commandement est, en octobre 1784, la prise de la
citadelle Kallingarh dans la région du Bundelkund. Le rajah de cette région finit par traiter avec Benoît de Boigne, ce qui permet à Sindhia d'entrer en maître à Delhi. Le chef mahratte se nomme
lui-même Colonne de l'empire et premier ministre. Cette prise de pouvoir engendre de nombreux conflits et de nombreuses trahisons.
Plusieurs batailles ont lieu entre Mahrattes, Moghols, Rajpoutes et Rathors, au cours des années suivantes. L'année 1788 est particulièrement mouvementée. Le 10 août, Gholam Kadir, un des
principaux protagonistes, fait arracher les yeux de l'empereur Shah Alam. Le 14 août, l'armée mahratte alliée à celle de son ancien ennemi Ismaël Beg entrent dans Delhi pour reprendre le ville
qu'ils avaient perdue un temps. Kadir s'échappe mais est capturé. Les Mahrattes lui arrachent les oreilles, les yeux, le nez et les membres et l’envoient, dans une cage de fer, à Delhi ; il
mourra en cours de route. Ses dépouilles sont par la suite remises à l'empereur.
Une nouvelle fois Mahadaji Sindhia triomphe et redevient le véritable détenteur du pouvoir politique du pays. Benoît de Boigne à cette période propose à Sindhia la création d'une brigade de dix
mille hommes afin de consolider l'assise politique et militaire du nouveau maître des Indes. Celui-ci refuse par manque de trésorerie mais également parce qu'il a des doutes sur la supériorité de
la combinaison artillerie-infanterie par rapport à la cavalerie qui constitue la force des armées mahrattes. Ce refus entraîne un nouveau différend entre les deux hommes. L'officier européen
donne alors sa démission. À nouveau sans emploi, il retourne à Lucknow.
De retour à Lucknow, Benoît de Boigne retrouve
ses amis Antoine-Louis Polier et surtout le lyonnais Claude Martin. Ce dernier réussit à convaincre le Savoyard de participer à ses activités commerciales. Bien que Benoît ne se sente pas l'âme
d'un commerçant il peut en revanche utiliser ses qualités militaires. À l'époque, les routes des Indes sont peu sûres et même certains comptoirs de commerce en ville sont parfois dévalisés.
Claude Martin aidé de Benoît crée un dépôt dans un ancien fort. Sa réalisation est confiée à Benoît de Boigne : des salles fortes sont construites, des gardes armés et incorruptibles sont
engagés et formés. Très vite cette entreprise remporte un grand succès. Parallèlement, le Savoyard exerce une activité de négociant en pierreries, cuivres, or, argent, indigo, cachemires,
soieries et épices. Le futur comte de Boigne, devenu un homme riche, possède une résidence luxueuse avec de nombreux serviteurs, une cave et des chevaux de grande valeur.
Durant cette période, Benoît tombe à Delhi sous le charme d'une jeune fille prénommée Nour (lumière en persan). Celle-ci est la fille d'un colonel de la garde persane du Grand Moghol
qu'il a rencontré pour régler un simple litige. Il sollicite le jour même, auprès du colonel, la main de sa fille. Après une longue discussion, le père accepte bien que Benoît ait refusé de se
convertir à l'Islam. Benoît fait la cour à Nour, celle-ci s'exprime parfaitement en anglais. La cérémonie du mariage qui dure plusieurs jours a lieu d'abord à Delhi, avec de fastueux repas puis
plus simplement à Lucknow(1788). Sa femme lui donne deux enfants, une fille en 1790 et un fils en 1791.
A SUIVRE
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