Nous publions ci-dessous un article publié sur le site www.aujourdhuilinde.com, article consacré
à Madame Mayawati, premier Ministre de l'Etat d'Uttar Pradesh, l'Etat le plus peuplé d'Inde. Si son ascension poltique est incontestable et probablement pas terminé, tout le monde
s'accorde à dire qu'elle est une femme avide de pouvoir et très corrompue...
Porte-drapeau des intouchables, Mayawati Kumari est devenue une figure incontournable du paysage politique indien et vient de faire son entrée dans le
classement Forbes des femmes les plus puissantes du monde. Forte de sa popularité inébranlable dans sa base d’Uttar Pradesh, elle convoite à présent le poste de Premier ministre. Parcours d’une
politicienne hors norme.
Mayawati est la 59ème femme la plus puissante au monde, selon le magazine Forbes
On ne parle que d'elle depuis des semaines. Son sourire étincelle, comme les diamants dont elle raffole. Sa fortune colossale, ses manœuvres politiques et les accusations de corruption qui vont avec ne l'encombrent guère. Son charisme est incontestable, son ascension politique, un conte de fée.
Partie du bas de la société pour atteindre les hautes sphères du pays, Mayawati symbolise à la fois le triomphe de la démocratie indienne et l'opportunisme qui continue de régir le système politique du sous-continent. Réélue pour la quatrième fois, l'année dernière, à la tête du gouvernement d'Uttar Pradesh, l'Etat le plus peuplé d'Inde, elle ne compte pas s'arrêter là. En convaincant les communistes et une multitude de partis régionaux de se rallier à sa formation du Bahujan Samaj Party lors du vote de confiance au Parlement, le 22 juillet dernier, elle a pris les rênes d'un "troisième front", une alternative aux deux partis majeurs: le Congrès et le Bharatiya Janata Party (BJP, nationaliste hindou).
A l'approche des élections, qui auront lieu en mai, beaucoup la voient déjà à la tête du prochain gouvernement. Elle la première. "Rien ne m'empêchera de devenir Premier ministre", affirmait elle récemment dans un entretien à l'hebdomadaire India Today qui lui consacrait sa couverture. Jeudi dernier, elle a fait son entrée dans le classement des "femmes les plus puissantes du monde" du magazine Forbes, à la 59ème place. Si son programme politique reste flou, sa détermination, elle, est bien palpable.
Née à New Delhi il
y a 52 ans, Mayawati est avant tout issue d'une famille dalit ou intouchable, la caste la plus basse de la société hindoue. Après des études de Droit, elle travaille en tant qu'institutrice, puis
se lance dans la politique en rejoignant le BSP, parti naissant fondé par Kanshi Ram, dédié à la cause des dalits en 1984. Elle succède à ce dernier puis remporte les élections en Uttar Pradesh
en 1995, alors quelle n'a que 39 ans. Une victoire historique pour une intouchable, dans un environnement politique et où le système de castes pèse encore très lourd.
Depuis Mayawati a été obligée d'élargir sa base, de faire des compromis pour
rester aux commandes en Uttar Pradesh. "Elle a formé des alliances politiques avec tout le
monde ! Elle a intégré des Brahmans, des musulmans, des représentants de castes intermédiaires à son gouvernement, considérant que c'est une nécessité pour obtenir et conserver une partie du
pouvoir", explique Gilles Vernier, chercheur au Centre de Sciences Humaines de Delhi et
spécialiste de l'Uttar Pradesh. Ambitieuse, Mayawati se fie à son instinct et adopte une stratégie politique purement pragmatique et n'hésite pas à courtiser, s'allier avec n'importe quel parti,
quitte à le lâcher ensuite. Ainsi, après s'être alliée au parti du Congrès, elle s'est par deux fois fait élire à la tête de l'Uttar Pradesh grâce au BJP, qui sert pourtant les intérêts des
hautes castes. Vaniteuse aussi, elle ordonne, en juin dernier que l'on retire une statue de bronze à son effigie posée un mois plus tôt au centre de Lucknow, la capitale d'Uttar Pradesh, en
réclamant une plus grande.
La popularité de Mayawati auprès des intouchables ne faiblit pas pour autant. "Son succès est perçu comme un signe d'assertion,
d'encouragement. Pour les dalits d'Uttar Pradesh, quand Mayawati est au pouvoir, au moins les salaires sont payés à temps", explique Gilles Vernier. Porte-voix des dalits, elle est paradoxalement la
personnalité politique la plus riche d'Inde. Cible, en 2003, d'une vaste enquête de police du Central Bureau of Investigation qui la soupçonne d'avoir détourné plus de 2 millions de d'euros, elle
expliquera simplement que cette fortune provient des "dons" de sa base. Là encore, elle sort relativement intacte de cette épreuve lorsque les poursuites contre elle sont
abandonnées.
Véritable animal politique, Mayawati vit à présent son heure de gloire. Le troisième front dont elle a habilement pris la tête aura sans nul doute un poids crucial dans les prochaines élections
qui auront lieu en mai. L'influence de la présidente du BSP dépasse désormais les frontières de l'Uttar Pradesh, un Etat dont sont issus 8 des 13 Premier ministres indiens depuis l'indépendance.
Les yeux rivés sur New Delhi, Mayawati est déterminée à devenir le neuvième.
clovis simard 19/10/2011 12:08