Hier matin en Inde, les portes des 30 000 institutions chrétiennes d'enseignement sont restées closes, en
signe de protestation contre les violences dont sont victimes les chrétiens de l'Orissa depuis cinq jours. Dans cet État de l'est de l'Inde, le meurtre samedi dernier d'un dirigeant local du
Vishwa Hindu Parishad (VHP, ou Conseil mondial hindou), a en effet déclenché des émeutes, certains activistes hindous accusant la communauté chrétienne d'être à l'origine de l'attaque bien que la
police l'ait, elle, attribué à la guérilla maoïste.
Le bilan officiel est de 11 morts et de 25 églises incendiées. Des centaines d'institutions et de maisons chrétiennes ont par ailleurs été saccagées, notamment dans le district de Kandhamal, où se concentre l'essentiel de l'agitation. Dans cette zone rurale reculée, plusieurs milliers de chrétiens ont fui dans les collines et forêts alentours, de peur d'être pris pour cible par les extrémistes hindous. Les premiers camps de réfugiés se sont mis en place.
Majoritairement tribal, ce district est l'un des plus pauvres de l'Orissa, mais aussi, depuis quelques années, le plus tristement célèbre. Des vagues de persécution anti-chrétienne ressurgissent épisodiquement, la dernière remontant à noël dernier. Les chrétiens, qui représentent 20% de la population (contre 2,3% au niveau national), sont régulièrement pointées du doigt par les organisations de l'hindouisme militant. Le religieux assassiné ce samedi avec quatre de ses fidèles, Swami Laxamanananda Saraswati, 85 ans, était d'ailleurs à la tête d'une campagne contre les conversions au christianisme.
Le prosélytisme chrétien reste une question très sensible dans le pays, particulièrement lorsqu'il concerne les tribus et les intouchables, où le zèle des missionnaires est souvent perçu comme agressif. Depuis plusieurs décennies, des activistes comme Saraswati militent ainsi pour "ramener" ces populations convertis dans le giron de l'hindouisme. Le gouffre entre les deux communautés s'agrandit donc un peu plus chaque jour. La dimension politique des récentes violences ne peut cependant être ignorée, les élections législatives locales en Orissa se tenant dans quelques mois.
François DAVIN 02/09/2008 22:30